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#155 – The Bluest Blues

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Ten Years After in « Pure Blues » (1975)

 

Gratter ou creuser, pourquoi choisir ?

Ma brève (mais intense) expérience de la vie me mène, certains soirs spirituels (comprendre : les soirs de surdosage en spiritueux), à débiter aux amis du débit des thèses philosophiques toutes personnelles, mais néanmoins universellement vraies et particulièrement clairvoyantes ! C’est en toute sobriété que je vous offre, à vous lecteurs avisés, une de ces théories de mon cru, merveilleusement concentrée en une maxime percutante et définitive :

« Deux types d’hommes composent notre monde : ceux qui grattent et ceux qui creusent. » Imparable, n’est-ce pas ?

Il y a bien sûr aussi ceux qui se grattent et ceux qui se creusent. Mais vous remarquerez que les catégories se superposent inévitablement, puisque ceux qui se grattent ont naturellement tendance à gratter avec avidité autour d’eux, tandis que ceux qui se creusent, rechignent rarement à creuser avec la même énergie (hit music only) en terre étrangère. Si vous me suivez encore, vous faites indubitablement partie de la seconde catégorie, celle des creuseurs, même si en me lisant vous vous grattez frénétiquement le crâne, en marmonnant nerveusement : « qu’est-ce qu’il me veut encore celui-là ?! ».

Mais je ne vous veux que du bien, rassurez-vous. Et d’ailleurs ce n’est ni de moi ni de vous qu’il s’agit, mais bien d’Alvin Lee, gratteur de génie et creuseur impénitent. Et oui, vous avez bien entendu : Alvin Lee gratte et creuse de concert ! Et c’est d’ailleurs en concert que le monde médusé découvre cette chimère monstrueuse. 

Nous sommes à Woodstock en 1969 (quelle belle année). Alvin Lee, quasiment inconnu de ce côté de l’Atlantique, sort sa gratte, y dépose ses doigts de feu, fait frémir le public, et creuse à jamais le sillon de sa gloire. En quelques minutes et une interprétation magistrale de son I’m Going Home,  il acquiert la notoriété internationale que dix creuses années de scènes européennes n’avaient pu lui apporter.  Dix années anglaises et allemandes (Alvin et sa bande passeront après les Beatles sur les mêmes scènes hambourgeoises décrites par ici) qui lui auront permis toutefois de hisser son jeu de guitare à un niveau de virtuosité exceptionnel, tout en déroulant à l’infini les fils du blues et du rock, pour parvenir, ten years after, à une maîtrise absolue de son art.

Voilà un homme qui, dès le début des années 1960, s’immerge totalement dans l’univers du blues et du rock, consolide les bases en épousant les voies des précurseurs (Elvis, Chuck, et les autres), poursuit inlassablement son apprentissage technique, et prend, enthousiaste, le relais de ses pères en taillant un coup de plus l’adamante que d’autres dieux avaient commencé à polir. C’est cela que j’appelle creuser : travailler son sujet inlassablement, en faire mille fois le tour, ne jamais se fatiguer et aller plus loin qu’aucun avant soi. Dompter enfin le blues sauvage.

Alvin a donc creusé son Lee. Sans matelas de sécurité aucun. Car en creusant, sachez-le, on se fait mal aux mains. Mais on finit souvent par tomber sur un os (à ronger), sur un rock (à roller), ou, chose plus rare, sur une pierre précieuse. Notre morceau du jour appartient à cette dernière catégorie. Son titre est éloquent. Nous avons affaire ici au blues le plus pur, le plus étincelant, le plus cristallin, bref le plus blues qui m’ait été donné d’écouter.

Il ne me reste plus qu’à remercier cet infatigable creuseur de blues qu’était Alvin. Et, si possible de le rassurer. Lee peut reposer en paix, car oui, à sa mesure, il a bien changé notre monde.

Let’s Rock Today (And Rock Again Tomorrow)

DS


Tagged: 1969, Alvin Lee, Blues, Blues Rock, Rock 'n' Roll, Ten Years After, The Bluest Blues, Woodstock

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